Dès midi, le centre ville de Nantes est constellé de bleu. La préfecture a choisi une nouvelle fois de faire monter la pression en déployant plusieurs centaines de policiers, des canons à eau et un hélicoptère face au défilé contre les violences d’État.
Durant plusieurs soirées d’échanges, plusieurs centaines de personnes ont pu se retrouver pour réfléchir et s’organiser dans différents lieux de la ville. Au terme de la semaine, il s’agit de reconquérir ces rues si souvent volées par la police. Le lieu de rendez-vous est précisément celui ou s’était achevé la grande manifestation de février dernier, à l’endroit même ou la police avait mutilé et blessé de nombreuses personnes.
Petit à petit, par grappes, une petite foule se forme dans le square Daviais, alors que des cohortes de la BAC contrôlent déjà tout ce qui peut ressembler à un manifestant dans les rues adjacentes. Deux heures plus tard, la manifestation s’élance après une prise de parole de l’assemblée des blessés qui ouvre le cortège. Cette assemblée, constituée à Montreuil en novembre dernier regroupe des collectifs de blessés par les armes de la police de toute la France.
Dans la foule, certain-e-s se masquent et se casquent, d’autres pas. Une battucada rythme l’arrière du cortège alors que résonnent des slogans à l’avant. Un char de carnaval, caricature de flic, suit de près la banderole de tête.
« Que fait la police ? Ca crève les yeux ! »
« Contre les violences policières/résistances/résistances »
« Rémi, Zyed, Bouna, on n’oublie pas, on ne pardonne pas ! »
Très vite, devant le commissariat du cours Olivier de Clisson – neutralisé depuis la manifestation du 22 février dernier – la tension monte. Une massive rangée de casqués gaze la foule en réponse à quelques jets de peinture. Plus loin, les cibles et les outils de la répression sont affichés sur les murs, en même temps que quelques taggs. De 1000 à 2000 au départ, les rangs gonfleront progressivement pour atteindre 4 à 5000 manifestants au plus fort de l’après midi.
Le dispositif policier est conséquent mais ne bloque pas le Cours des 50 Otages, qui avait été barricadé par la préfecture l’an passé. Les manifestants empruntent donc le trajet dont ils avaient été privé par le passé, dans le crépitement des fumigènes. A chaque croisement, les rues vomissent des rangées de boucliers, de canons à eau, de policiers prêt à faire feu à coups de flashball. La colère monte par intermittence. Les flics sont hués, essuient quelques projectiles parfois. La pression monte par deux fois, Place du Bouffay et Place de la Bourse. Ici, une violente charge de la BAC Lanceurs de Balles braqués sur la foule fait monter la tension. Des dizaines de manifestants chargent à leur tour les agresseurs qui refluent à toute vitesse, après avoir arrêté deux personnes et blessé un manifestant à hauteur de tête. Mais le défilé continue.
La Place de la Petite Hollande, véritable champ de tir l’an passé est contournée. Le cortège choisi de retourner vers le centre ville. Cette fois ci, la préfecture a décidé de redéployer ses centaines de flics pour empêcher les manifestant de réinvestir l’hyper centre. Un point de tension se concentre au niveau de l’Hôtel Dieu. Un face à face s’installe. Gaz, flashball et canons à eau contre quelques cailloux. Le char de carnaval est envoyé vers les boucliers, ce qui provoque un assaut. Un étau policier se forme alors que des bourrasques neigeuses s’abattent sur l’esplanade. Les quelques centaines de déterminés restants refluent au rythme des charges de la BAC et des CRS, en allumant quelques barricades sur leur passage. La chasse à l’homme continuera jusqu’en début de soirée au delà de la Loire.
Plusieurs manifestants seront blessés, et 10 interpelés. Des journalistes et des secouristes seront aussi pris pour cible et molestés par la police.
Malgré la saturation du champ médiatique par l’antiterrorisme, malgré les intenses menaces policières, malgré le sabotage méthodique de diverses organisations opposées à l’aéroport, cette semaine fut une réussite.
D’abord parce qu’elle nous a permis de reprendre confiance en nous, de nous retrouver, d’échanger, ensuite parce que nous avons repris les rues de la ville un an après la journée du 22 février 2014.
Cette semaine n’est pas une fin mais un début.
Diffusons nos révoltes.
Des images de Taranis News : https://www.youtube.com/watch?v=PhCirpVdbL8
[Repris d’Indymedia Nantes]